vendredi 18 mai 2018

Mai 1968 / Mai 2018 "Révolution - Contre Révolution ?"





Jeudi 17 mai 2018, à l'Heure bleue à Saint Martin d'Hère, la société des lecteurs de l'Humanité organisait une conférence - débat sur le thème
Mai 1968 / Mai 2018 "Révolution - Contre Révolution ?"
En présence de Roger Martelli, historien et de Bernard Thibault.
Une belle soirée.
https://1drv.ms/v/s!AqwMRQksgZuEga1zLpNnTyQcODhr3Q

Les interventions de Roger Martelli et Bernard Thibault lors de la soirée du 17 mai organisée par la S2LH-38 sont disponibles sur notre chaine dailymotion :


on peut aller directement à la playlist "Mai 1968 - Mai 2018" ici : https://www.dailymotion.com/playlist/x5t02g






Séance de dédicaces






mercredi 9 mai 2018

La peine de mort est un crime d'Etat



La peine de mort est un crime d'Etat

Chaque fois qu'un crime de viol avec assassinat survient dans notre pays les apologistes de la peine de mort, exploitant le drame donc personne ne peut rester insensible, sortent leurs pancartes. La peine de mort est un crime d'État, et on ne punit pas le crime par le crime.
D'autant que la peine de mort n'est pas dissuasive et elle est irréversible en cas d'erreur comme pour l'affaire du Pull-over rouge ou un humain est mort pour rien et ça a fait un mort de plus.
Parmi nos illustres anciens Robespierre, que l'on présente comme un sanguinaire (de moins en moins avec les progrès de la recherche historique), comme Condorcet à la même époque soutint dans cet esprit l'abolition de la peine de mort qui lui paraissait avant tout injuste et inutile, dangereuse pour les citoyens. Néanmoins, malgré l'approbation des comités de constitution et de jurisprudence criminelle et le soutien explicite de Duport et de Pétion, la proposition de Robespierre fut rejetée et la peine de mort maintenue comme nécessaire à l'ordre social et à l'autorité publique. Toute la droite de la constituante fit bloc autour du refus.
Robespierre le 30 mai 1791.
« Gardez-vous bien de confondre l'efficacité des peines avec l'excès de la sévérité ; l'une est absolument opposée à l'autre. Tout seconde les lois justes et modérées ; tous conspirent contre les lois cruelles. L'indignation qu'excite le crime est balancée par la commisération qu'inspire l'extrême rigueur des châtiments. La voix irrésistible de la nature s'élève contre la loi, en faveur du coupable. Chacun s'empresserait de livrer un coupable, si la peine était douce, mais il s'en la nature frémir au-delà de lui à la seule idée d'envoyer à la mort. Oui, je ne crains pas de le dire, cette loi que vous avez imposée à tous les citoyens de dénoncer les coupables ne sera qu'une loi inique, absurde et impraticable, si vous conservez la peine de mort. Cette première disposition prouve la nécessité de combiner l'ensemble des lois ; elle prouve qu'une loi isolée peut devenir absurde par ses rapports avec les autres lois.
La force des lois dépend de l'amour et du respect qu'elles inspirent ; et cet amour, ce respect dépendent du sentiment intime qu'elles sont justes et raisonnables. Ouvrir histoire de tous les peuples : vous verrez que la douceur des lois pénales y est toujours en raison de la liberté, de la sagesse, de la douceur du gouvernement. Vous voyez cette gradation suivie dans l'histoire des peuples. J'en ai cité mes exemples ; je vous rappelle à celui, non pas, de la Toscane, mais à celui qu'un empire qui avait toujours été soumis au despotisme, à la Russie. Il faut donc croire que le bonheur de la société n'est pas attaché à la peine de mort, puisqu'une grande société qui n'a. Les mœurs d'un peuple libre continue d'exister quoi que la peine de mort y ait été abolie. Il faut croire que le peuple doux, sensible, généreux qui habite la France, et dont toutes les vertus vont être développées par le régime de la liberté traitera avec humanité les coupables, et convenir que l'expérience, la sagesse vous permettent de consacrer les principes sur lesquels s'appuie la motion que je fais que la peine de mort soit abolie ».(1)
Robespierre réclame l'abolition de la peine de mort en ces termes : « écoutez la voix de la justice et de la raison ; elle vous crie que les jugements humains ne sont jamais assez certains pour que la société puisse donner la mort à un homme condamné par d'autres hommes sujets à l'erreur ». Il continuera par la suite à combattre sans relâche les propositions successives d'extension des possibilités de recours à la peine de mort.(2).
Plus tard nôtre Victor Hugo national plaida également l'abolition. « Selon les criminalistes, la peine de mort à deux efficacités, l'une directe, l'autre indirecte, le coût qu'elle frappe sur l'individu par le retranchement, le coût qu'elle frappe sur la société par l'exemple.
Voyons d'abord ce que c'est que l'exemple.
L'exemple, le bon exemple donné par la peine de mort, nous le connaissons. Il a eu plusieurs noms. Chacun de ces noms exprime tout un ordre de faits et d'idées. L'exemple s'est appelé Montfaucon, il s'est appelé la place de grève, il s'appelle aujourd'hui la barrière Saint-Jacques. Examiner les trois termes de cette progression décroissante : Montfaucon, l'exemple terrible et permanent ; la place de grève, l'exemple qui est encore terrible, mais qui n'est plus permanent ; la barrière Saint-Jacques, l'exemple qui n'est plus ni permanent ni terrible, l'exemple inquiet, honteux, timide, effrayé de lui-même, l'exemple qui s'amoindrit, qui se dérobe, qui se cache. Le voilà à la porte de Paris, prenez garde, si vous ne le retenez pas, il va s'en aller ! Il va disparaître !
Qu'est-ce à dire ? Voilà qui est singulier ! L'exemple qui se cache, l'exemple qui fait tout ce qu'il peut pour ne pas être l'exemple. Nous n'en rions pas. La contradiction n'est étrange qu'en apparence ; au fond il y a en ceci quelque chose de grand et de touchant. C'est la sainte pudeur de la société qui détourne la tête devant un crime que la loi lui fait commettre. Ceci prouve que la société a conscience de ce qu'elle fait est que la loi ne l'a pas.
Voyez, examinez, réfléchissez. Vous tenez à l'exemple. Pourquoi ? Pour ce qu'il enseigne. Que voulez-vous enseigner avec votre exemple ? Qu'il ne faut pas tuer. Et comment enseignez-vous qu'il ne faut pas tuer ? En tuant.
En France, l'exemple se cache à demi. En Amérique, il se cache tout à fait. Ces jours-ci on a pu lire dans les journaux américains l'exécution d'un nommé Hall. L'exécution a eu lieu non sur une apparence de place publique, comme à Paris, mais à l'intérieur de la prison. « Dans la geôle ». Y avait-il des spectateurs ? Oui, sans doute. Que deviendrait l'exemple s'il n'y avait pas de spectateurs ? Quel spectateur donc ? D'abord la famille. La famille de qui ? Du condamné ? Non, de la victime. C'est pour la famille de la victime que l'exemple s'est fait. L'exemple a dit au père, à la mère, au mari (c'est une femme qui avait été assassinée) au frère de la victime : cela vous apprendra ! À ! J'oublie, il y avait encore d'autres spectateurs une vingtaine de gentlemen qui avaient obtenu des entrées de faveur moyennant une guinée par personne. La peine de mort en est là. Elle donne des spectacles à huis clos à des privilégiés, des spectacles où elle se fait payer, et elle appelle ça des exemples !
De deux choses l'une : ou l'exemple donné par la peine de mort est moral, où il est immoral. S'il est moral, pourquoi le cachez-vous ? S'il est immoral, pourquoi le faites-vous ?
Pour que l'exemple soit l'exemple, il faut qu'ils soient grands ; s'il est petit, il ne fait pas frémir, il fait vomir. D'efficace il devient inutile, d'effrayant, misérable. Il ressemble à une lâcheté. Il en est une. La peine de mort furtive secrète n'est plus que le guet-apens de la société sur l'individu.
Soyez donc conséquents. Pour que l'exemple soit l'exemple, il ne suffit pas qu'il se fasse, il faut qu'il soit efficace. Pour qu'il soit efficace, il faut qu'il soit terrible ; revenez à la place de grève ! Il ne suffit pas qu'il soit terrible, il faut qu'il soit permanent ; revenez à Montfaucon ! Je vous en défis.
Je vous en défis ! Pourquoi ? Parce que vous en frissonnez vous même, parce que vous sentez bien que chaque pas en arrière dans cette voie affreuse est un pas vers la barbarie ; parce que, ce qu'il faut aux grandes générations du XIXe siècle, ce n'est point départ en arrière, ce n'est pas en avant ! Parce qu'aucun de nous, aucun de vous ne veut retourner vers l'héroïne hideuse et difforme du passé, et que nous voulons tous marcher, du même pas est du même cœur, vers le rayonnant édifice de l'avenir !
Rejetons donc la théorie de l'exemple. Vous y renoncez vous-même, vous voyez bien.
Reste l'efficacité directe de la peine de mort ; le service rendu à la société par le retranchement du coupable ; la mesure de sûreté. La peine de mort est la plus sur des prisons. Ah ! Ici, vous frissonnez encore, malgré vous-mêmes. Quoi, le tombeau utilisé comme maison de justice ! La mort devient un employé de l'État ! La mort devient un fonctionnaire auquel on donne à garder les hommes dangereux ! Voici un homme qui a fait le mal et qui peut le faire encore, vous pourriez essayer de guérir cette âme et d'en déraciner le crime ; mais non, vous n'allez pas si loin, bah ! Améliorer un homme, le corriger, l'assainir, le sauver physiquement et moralement, théories ! Visions ! Rêveries de poètes ! Vous dites : il faut enfermer cet homme, la meilleure manière de l'enfermer c'est de le tuer, et vous le tuez !
Monstrueux.
À législation barbare, raisonnement sauvage. Criminalistes, débattez-vous sous vos propres énormités.
J'ai examiné la peine de mort par ses deux côtés, action directe, action indirecte. Qu'en reste-t-il ? Rien. Rien qu'une chose horrible et inutile, rien qu'une voie de fait sanglante qui s'appelle crime quand c'est l'individu qui l'accomplit, et qui s'appelle justice (ô douleurs !) Quand c'est la société qui la commet. Sachez ceci, qui que vous soyez, législateurs ou juges, aux yeux de Dieu, aux yeux de la conscience, ce qui est le crime pour l'individu et le crime pour la société.
Encore une réflexion, remarquez l'attitude des criminalistes devant cette question de la peine de mort. Ceci vous dira le fond de leur pensée ; ceci vous dira où en est la pénalité capitale dans le for intérieur de ceux qui la défendent. Voyez d'abord les vieux, les gothiques, les féodaux. Le supplice leur plaît et les fait rayonner. Farinace salue l'échafaud comme le prêtre salue l'autel : c'est en effet son hôtel à lui. Des criminalistes anciens sont fiers de la peine de mort ; les criminalistes modernes en sont honteux, et n'en parlent qu'en s'essuyant le front.
C'est qu'en vérité, ces derniers sont de notre avis ; c'est que le rayon de l'équité naturelle, quand il traverse tout un siècle, n'épargne aucune âme et les pénètre toutes. Dieu le veut. Au fond ces hommes pensent comme nous de l'échafaud, il est dès aujourd'hui abattu dans leur conscience ; demain il ne sera dans la place publique.
Ils nous disent seulement : - attendez un peu !
Attendre ? Pourquoi attendre ? On coupe des têtes pendant ce temps-là.
Lorsque l'Assemblée nationale faisait la constitution, la question s'est présentée. Je lui ai crié : c'est l'heure, hâtez-vous ! Faites de grands pas ! Faites de grandes choses ! Il y a de certains moments où il faut donner des coups de colliers en civilisations, précipiter le progrès, entraîner le genre humain ! Ceci est une occasion, remerciez Dieu, et profitez-en ! Une constitution nouvelle, en France, au XIXe siècle, doit jeter autour d'elle, au moment où elle apparaît, une clarté subite ! Elle doit être l'adoption des classes souffrantes et malheureuses ! Elle doit saisir l'intelligence des nations par la consécration éclatante du bien, du juste et du vrai. La civilisation se compose de ses acceptions successives et solennelles de la vérité. Et bien ! Consacré aujourd'hui, tout de suite, sans plus attendre, ce grand fait : l'inviolabilité de la vie humaine ! Abolissez la peine de mort.
L'assemblée a écouté, mais n'a pas entendu.
Savez-vous ce qui est triste ? C'est que c'est sur le peuple que pèse la peine de mort. Vous y avez été obligés, dites-vous. Il y avait dans un plateau de la balance ignorance et la misère, il fallait faire contrepoids dans l'autre plateau, vous y avez mis la peine de mort. Et bien ! Ôtez la peine de mort, vous voilà forcés, forcés, entendez-vous ? Dotez aussi l'ignorance et la misère. Vous êtes condamnés à toutes ces améliorations à la fois. Vous parlez souvent de nécessité, je mets la nécessité du côté du progrès, en vous contraignant d'y recourir, par un peu de danger aux besoins.
Ah ! Vous n'avez plus la peine de mort pour vous protéger. Ah ! Vous avez la devant vous, face à face, l'ignorance et la misère, ces pourvoyeuses de l'échafaud, et vous n'avez plus l'échafaud ! Qu'allez-vous faire ? Pardieu combattre ! Détruire l'ignorance, détruire la misère ! C'est ce que je veux.
Oui je veux vous précipiter dans le progrès ! Je veux brûler vos vaisseaux pour que vous ne puissiez revenir lâchement en arrière ! Législateurs, économistes, publicistes, criminalistes, je veux vous pousser par les épaules dans les nouveautés fécondées humaines comme on jette brusquement à l'eau l'enfant auquel on veut apprendre à nager. Et vous voilà en pleine humanité, j'en suis fâché, nagez, tirez-vous de là !
Tenez, tant que nous sommes, renonçons à la terreur. Depuis 6000 ans les sociétés humaines vivent sur la haine, c'est assez ! Essayons l'amour ! ». (3)

Il aura fallu attendre le 17 septembre 1981 et le discours de Robert Badinter :
« Demain vous voterez l'abolition de la peine de mort »
où il revient sur l'exemplarité :
« Ce sont les autres, ceux que j'évoquais précédemment qui peuplent ces annales. En fait, ceux qui croient à la valeur dissuasive de la peine de mort méconnaissent la vérité humaine. La passion criminelle n'est pas plus arrêtée par la peur de la mort que d'autres passions ne le sont qui, celles-là, sont nobles. Et si la peur de la mort arrêtait les hommes, vous n'auriez ni grands soldats, ni grands sportifs. Nous les admirons, mais ils n'hésitent pas devant la mort. D'autres, emportés par d'autres passions, n'hésitent pas non plus. C'est seulement pour la peine de mort qu'on invente l'idée que la peur de la mort retient l'homme dans ses passions extrêmes. Ce n'est pas exact. Et, puisqu'on vient de prononcer le nom de deux condamnés à mort qui ont été exécutés, je vous dirai pourquoi, plus qu'aucun autre, je puis affirmer qu'il n'y a pas dans la peine de mort de valeur dissuasive : sachez bien que, dans la foule qui, autour du palais de justice de Troyes, criait au passage de Buffet et de Bontems : "A mort Buffet ! A mort Bontems !" se trouvait un jeune homme qui s'appelait Patrick Henry. Croyez-moi, à ma stupéfaction, quand je l'ai appris, j'ai compris ce que pouvait signifier, ce jour-là, la valeur dissuasive de la peine de mort ! » (Applaudissements sur les bancs des socialistes et des communistes.)
Il faudrait lire l'intégralité du discours.
L'exemple de l'amiante véritable crime industriel qui a fait 100 000 morts alors qu'on connaissait le danger depuis 1906 ! Doit-on tuer tous ceux qui ont laissé faire ?  
Combien de chefs d'État devraient subir ce châtiment pour avoir fait tuer inutilement, des jeunes dans des guerres coloniales. En Algérie 30 000 jeunes français tués, 600 000 à un million d'Algériens. Et puis tous les viols commis par l'armée française et restés impunis. Et je peux en témoigner. Ça en ferait des peines de mort ! Un dernier mot tous ceux qui sont pour la peine de mort devraient être mis en situation, il comprendraient ce que veut dire tuer quelqu'un. Là aussi je peux en témoigner. C'était justement pendant la guerre d'Algérie. J'avais deux êtres humains supposés être des "fellagas" dans la lunette de mon fusil et je n'ai pas tiré. Et aujourd'hui j'en suis fier.
Michel Cialdella






1) Robespierre. Écrits. Présenté par Claude Mazauric. Éditions sociales. 1989.
2) Robespierre, reviens ! Alexis Corbière, et Laurent Maffaïs. Préface de Claude Mazauric- Éditions Bruno Leprince 2012.
3) discours sur la peine de mort. Septembre 1848. Victor Hugo le droit et la loi et autre textes citoyens. Éditions 10/18. Février 2002.
4) « Demain vous voterez l'abolition de la peine de mort » discours de Robert Badinter à l'assemblée le 17 septembre 1981.
http://www.weblettres.net/blogs/uploads/r/Rispal/10508.pdf


mardi 8 mai 2018

Nouveau hold-up sur les salaires


Nouveau hold-up sur les salaires
 Après Raffarin qui a rétabli partiellement l'esclavage en faisant travailler gratuitement les salariés le lundi de Pentecôte au prétexte de solidarité envers les personnes âgées. La ministre de la Santé Agnès Buzyn a en effet reconnu jeudi qu'une nouvelle journée de "solidarité" faisait partie des "pistes" envisageables.
Dans notre pays la lutte contre l'esclavage a une longue histoire. Robespierre le 13 mai 1791 lors d'un débat à la convention sur la condition des personnes dans les colonies il déclare « dès le moment où dans un de vos décrets vous aurez prononcé le mot esclave, vous aurez prononcé votre propre déshonneur…
le 24 septembre 1791 : « moi, dont la liberté sera l'idole, moi qui ne connais ni bonheur, ni prospérité, ni moralité pour les hommes, ni pour les nations sans liberté ; je déclare que j'abhorre de pareils systèmes, et que je réclame votre justice, l'humanité, la justice et l'intérêt national en faveur des hommes libres de couleur ».
S'il y eut rétablissement de l'esclavage dans les colonies françaises d'Amérique, c'est bien parce qu'il y avait été précédemment aboli. Cela s'était réalisé en deux temps en 1793 puis par la convention qui vota son abolition le 4 février 1794
 20 mai 1802 : le Premier Consul Bonaparte légalise l'esclavage aux colonies - Ce retour à l'ordre ancien provoque la révolte et l'émancipation de la riche colonie de Saint-Domingue ... Profitant du répit offert par la paix signée à Lunéville avec l'Autriche, il décide de rétablir à Haïti la souveraineté française.
DÉCRET.
ART. Ier Dans les colonies restituées à la France en exécution du traité d'Amiens, du 6 germinal an X, l'esclavage sera maintenu conformément aux lois et réglemens antérieurs à 1789.
II. Il en sera de même dans les autres colonies françaises au-delà du Cap de Bonne-Espérance.
III. La traite des noirs et leur importation dans lesdites colonies, auront lieu, conformément aux lois et réglemens existans avant ladite époque de 1789.
IV. Nonobstant toutes lois antérieures, le régime des colonies est soumis, pendant dix ans, aux réglemens qui seront faits par le Gouvernement.

Puis l'abolition de l'esclavage en France a été signé le 27 avril 1848 par le Gouvernement provisoire de la Deuxième République. Il a été adopté sous l'impulsion de Victor Schœlcher . (homme politique 1804-1893).
Pas gêné le gouvernement Macron poursuit la guerre aux salaires en voulant faire travailler gratuitement les salariés une journée de plus. Mais que fait le Conseil constitutionnel !
En attendant il vaut mieux compter sur la mobilisation des salariés pour faire capoter ce projet néfaste, qui, s'il n'est pas exactement de l'esclavage puisque les salariés ne seront pas fouettés, mais ressemblent aussi un peu au STO de sinistre mémoire.
Michel Cialdella

Notes
l'esclavage à la française. Le code noir (1685 et 1724) présentation de Robert Chesnais. Éditions Nautilus 2006.
En 1685, Louis XIV codifiait la pratique de l'esclavage dans les colonies françaises, réglementation complétée en 1724 est restée en vigueur jusqu'à l'abolition de 1848.
Connu sous le nom de « code noir », ce texte jette une lumière terriblement crue, dans sa froideur administrative, sur la condition quotidienne que la France imposée au noir.
Introduction.
Page 7.
La célébration de 1998 n'avait été exempte ni de maladresses, ni de non-dit. Parmi les premières, on peut citer le fait que l'abolition soit présentée comme une sorte de don octroyé généreusement par la mère patrie à ses esclaves alors que les autorités politiques ne semblent guère exprimer de regrets pour les souffrances endurées et les hécatombes subies par ceci, tout en ne faisant aucune allusion au rôle joué par la résistance des intéressés eux-mêmes : mutineries, révoltes, maraudages, soulèvements. Quant au second, ils sont légion, depuis le passage sous silence d'une première abolition votée par la convention le 4 février 1794. Mais abrogé par Napoléon en 1802, jusqu'à l'oubli de mentionner qu'en 1848, notre pays loin d'être pionnier dans ce domaine puisque l'avait notamment précédé le Danemark en 1792, le Mexique en 1829 ou l'Angleterre en 1833 (sans parler d'une bonne partie des Etats des États-Unis entre 1769 et 1804), en passant par l'omission complète de l'instauration du travail forcé en lieu et place de l'esclavage dans la seconde moitié du XIXe siècle, rester en vigueur tard au cours du siècle suivant dans nombre de colonies.
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Quelques années auparavant, par une bulle datée du 8 janvier 1454, le pape Nicolas V avait rassuré tout ce qui aurait pu avoir d'éventuels problèmes de conscience, en déclarant licite l'esclavage des noirs à condition d'en profiter pour les convertir au christianisme romain.

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le code noir de 1685.
Louis, par la grâce de Dieu roi de France et de Navarre : à tous, présent et avenir, salut. Comme nous devons également nos soins à tous les peuples que la divine providence a mis sous notre obéissance, nous avons bien voulu faire examiner en notre présence les mémoires qui nous ont été envoyés par nos officiers de nos îles de l'Amérique, par lesquelles ayant été informé du besoin qu'ils sont de notre autorité et de notre justice pour y maintenir la discipline de l'église catholique, apostolique et romaine, pour y régler ce qui concerne l'État et la qualité des esclaves dans nos dites îles, désirant ils pouvoir et leur faire connaître qu'encore qu'ils habitent des climats infiniment éloignés de notre séjour ordinaire, nous leur sommes toujours présents, non seulement par l'étendue de notre puissance, mais encore par la promptitude de notre application à les secourir dans leur nécessité. À ces causes, la vie de notre conseil, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, nous avons dit, statuer et ordonner, disons, statuons et ordonnons, voulons et nous plaît ce qui ensuit.
Exemple de l'article 2–tous les esclaves qui seront dans nos îles seront baptisés et instruits dans la religion catholique, apostolique et romaine. ….
À l'article 15–défendons aux esclaves de porter aucune arme offensive, ni de gros bâtons, à peine de fouet et de confiscation des armes au profit de celui qui les en trouvera saisis…

samedi 5 mai 2018

Annie Lacroix Riz - L'Histoire contemporaine toujours sous influence 6/1...



Critique de livre par Claude Mazauric.
La (grande) bourgeoisie et l'inavouable collaboration
Chronique de "L’histoire contemporaine toujours sous influence", d' Annie Lacroix-Riz, Paris. En 2004, parut au Temps des cerises sous le titre prosaïque L’histoire contemporaine sous influence la première édition du présent essai : sa réédition entièrement refondée, élargie, corrigée et complétée, s’insère désormais dans le double catalogue du Temps des cerises et des Editions Delga. La réédition élargit le contenu de l’édition première et en accentue les angles saillants. Ce qu’exprime fort bien ce « toujours sous influence » qui en illustre le titre.

Depuis le dernier tiers du XXe siècle, Annie Lacroix-Riz poursuit avec persévérance un combat que je considère personnellement comme méritoire et nécessaire, contre les tentatives inlassablement réitérées d’exempter la grande bourgeoisie française de son essentielle responsabilité politique et morale dans la collaboration avec le nazisme, après la défaite de 1940. Idéologiquement travaillée par l’action de la « synarchie » et même de la « cagoule » et d’autres groupuscules fascisants et provocateurs, elle y était prête. Politiquement soumise à l’influence de l’oligarchie financière et industrielle qui demeurait hantée par le souvenir de 1936, une bonne partie des milieux dirigeants et influents de la Troisième république, était préparée à suivre la pente où les intérêts de classe et leur conservatisme social les entraînaient.

Tout comme la haute hiérarchie de l’Eglise catholique, soit dit en passant, ces gens-là considéraient que leur seul et véritable adversaire était le bolchevisme dont le Front populaire n’avait été à leurs yeux qu’une réplique plutôt fantomatique, instable et récupérable, de moins de deux années, mais inquiétante, toujours menaçante. Enquête après enquête, livre après livre, Annie Lacroix-Riz n’a cessé d’approfondir sa démonstration dérangeante concluant sans rémission à la responsabilité de la bourgeoisie française, entendue comme classe dominante, dans l’avilissement de la France, malgré le sursaut gaullien qui ne prit racines que très tardivement quand se profila la défaite des hitlériens.
Comment l’historienne s’est-elle engagée dans ce combat ?

La question est d’importance. Elle s’y consacra d’abord en montrant audacieusement à tous, que bardée de diplômes prestigieux à faire pâlir un lettré chinois de l’époque classique, d’un savoir-faire assumé doublé d’une énergie incroyable et d’une pratique des langues étrangères comme peu en disposent, enfin d’un statut universitaire qu’il a bien fallu lui reconnaître (d’abord à Toulouse, ensuite à Paris), elle connaissait les règles du métier. Pour lui répondre et invalider son argumentaire, il faudra donc déplacer des montagnes discursives et lire des tonnes de travaux, ce qui n’est pas à la portée de tous ! Ensuite, en raison de son infatigable travail d’enquête dans les fonds d’archives accessibles en France et hors de France dont elle a épuisé les ressources, il faudra mobiliser pour tenter de lui répondre sur le fond, un déplacement de forces équivalent, ce qui en vérité dépassait l’ordre habituel des choses. Que faire alors pour parer à la menace qu’elle incarnait sur le plan idéologique ?

Le procédé est classique et inépuisable : d’abord faire silence autant que possible dans les médias sur le contenu de l’œuvre; ensuite, quand la méthode précédente crée plus de mécomptes que d’avantages, en médire en évoquant moins le résultat final d’un travail dont on parlera peu, sinon globalement ce qui ne mange pas de pain, en traitant surtout des origines, des appartenances subjectives et des intentions supposées ou avérées qu’on prêtera à l’auteure ; enfin, en jetant le discrédit académique sur sa personne ce qui éloignera d’elle collègues empesés par l’habit doctoral ou jeunes chercheurs ; enfin, faire en sorte que l’œuvre d’Annie Lacroix-Riz ne sorte pas du cercle restreint, aseptisé et sous contrôle de ces « spécialistes » (comme on dit) qui dominent dans les institutions de recherche et autres appareils idéologiques d’Etat. Il est d’ailleurs souvent arrivé que par esprit chevaleresque, candeur ou arrogance, Annie Lacroix-Riz ait favorisé les manœuvres destinées à l’abattre, en facilitant face à elle la constitution d’un front adverse associant sycophantes attitrés et censeurs hypocrites, à de simples questionneurs indécis, sceptiques, timides ou portés à la conciliation par souci de préserver ce minimum de consensus professionnel qui aide à survivre dans le monde impitoyable de l’histoire du temps présent. Reste que beaucoup attendaient l’hallali : ils en seront pour leurs frais !

Voilà tout l’arrière-plan qui fait le grand intérêt du livre dont il est ici question. Mais en le lisant, on en apprendra beaucoup. En particulier (chapitre 2) sur la manière dont les bailleurs de fonds capitalistes qui soutiennent l’histoire des entreprises en bénéficiant de la complaisance de mandarins réputés, poursuivent, ce faisant, l’objectif de laver le cerveau des citoyens, par exemple en cherchant à effacer le souvenir des turpitudes passées (notamment lors de l’aryanisation des entreprises pendant l’occupation). A leur instigation, ce qui pour tout le monde relevait de la « collaboration économique » de la plupart des grandes firmes françaises avec le Troisième Reich, ne relève plus que de « taxinomies d’époque (sic) » … Et hop, passez muscade ! Chapitre 3 : qui ne se souvient de l’affaire Touvier ? On sait que le chef de la milice en Rhône-Alpes, abominable et fanatique tortionnaire, bénéficia après la Libération de la protection d’une partie de la hiérarchie catholique : devant la révélation de la chose, on inventa une « commission » (présidée par René Rémond dont la personne s’oublie plus vite que son discours) dont les conclusions bien balancées n’eurent pour effet que d’euphémiser la responsabilité de hiérarques plus ou moins compromis ou serviles, marquant ainsi le « triomphe du cléricalisme académique » comme écrit joliment Annie Lacroix-Riz.

Le « fichier juif » établi par l’administration française qu’on tint longtemps pour détruit et qui fut retrouvé, ce « fichier de la honte » fut certes soumis à l’expertise d’une commission puis d’une mission pratique (la « Mission Mattéoli » ) mais leurs conclusions se sont surtout signalées par l’art de ne rien dire ou presque mais de tout régler « au mieux » des affaires, c’est à dire en accréditant l’idée qu’il fallait d’abord montrer de la contrition avant de se soumettre au fameux « devoir de mémoire » mais avec un peu moins de colère rétrospective ! Heureusement pour l’honneur de la France, deux des plus hautes autorités de l’Etat, les présidents Jacques Chirac et François Hollande très récemment, sont allés au bout de la conclusion que les commissions avaient renoncé à formuler, en reconnaissant la responsabilité propre de la France et de son administration dans le génocide et la collaboration avec le nazisme. A quand le même aveu sur la question du colonialisme ?

Le livre d’Annie Lacroix-Riz s’achève sur l’évocation de l’ « affaire Renault », c’est à dire sur la tentative engagée par les héritiers de Louis Renault d’imposer la réhabilitation officielle de l’ancêtre dans toutes ses conséquences possibles. Rappelons que Louis Renault décéda en prison peu après la Libération où il avait été conduit pour collaboration industrielle avec l’occupant. La prétention de l’héritière et de son conjoint, l’historien « moderniste » Laurent Dingli, était d’obtenir que le peuple français, c’est à dire les contribuables, soit en outre condamné à leur verser une indemnisation pour le préjudice que le séquestre et la nationalisation des usines Renault, voulus par de Gaulle et son gouvernement inspiré par les propositions du C.N.R., firent prétendument subir à la famille Renault. Ils s’appuyaient sur la « recherche » (si l’on ose dire) d’une historienne allemande qui avait, disait-on, blanchi Louis Renault des accusations portées contre lui. De cette historienne, on lira avec jubilation le portrait en pied qu’en donne Annie Lacroix-Riz (pages 192-194) mais surtout on retiendra que les preuves fournies par Annie Lacroix-Riz ont eu raison des intentions initiales des héritiers que la complaisance d’historiens faux-culs, un tapage médiatique parfaitement organisé et la croyance aux vertus exclusives de l’anti-communisme viscéral pour emporter la décision, avaient encouragés à mener une bataille qui s’est révélée bien trop rude pour leurs médiocres épaules.

Assorti de 327 notes et justifications, le livre d’Annie-Lacroix-Riz mérite d’être lu, médité, soupesé et discuté sans préjugés, c’est à dire pour ce qu’il énonce et établit et non pour ce qu’on dit de lui. A mes yeux, il relève pour une part de ce qu’on peut désigner comme une exigence du salut public. 

mercredi 2 mai 2018

Les grands mensonges de l'ouverture à la concurrence.


Les grands mensonges de l'ouverture à la concurrence.
L'Humanité du mercredi 2 mai 2018



La marche forcée vers la privatisation des services publics depuis bientôt 30 ans a signé la fin des investissements, la hausse des prix, la dégradation des prestations. Les effectifs ont drastiquement baissé et les conditions travail se sont détériorées.
« Je dis aux syndicats : n'ayez pas de crainte illégitime, la SNCF restera publique, ce sera dans la loi et les cheminots resteront cheminots », encore une fois promit Emmanuel Macron lors de son passage au JT de 13 heures de Jean-Pierre Pernaut, sur TF1. Sauf que les syndicats n'ont pas la mémoire courte. Ils se souviennent de Paul Quiliès, qui disait à propos de France Telecom en 1990 : « le service public est notre bien commun, toute idée de privatisation est totalement étrangère à ma démarche et celle du premier ministre ». Et de Nicolas Sarkozy, promettant en 2004 qu'« EDF-GDF ne sera pas privatisée ». Ou encore de Christine Lagarde, qui jurait en juillet 2008 que « la poste restera, et ce n'est pas négociable, une entreprise publique ». Chaque fois, le schéma est le même. Ouverture du secteur à la concurrence, ouverture du capital du service public, transformée en société anonyme, et désengagement progressif de l'État jusqu'à la privatisation complète