jeudi 30 janvier 2014

Ce ne sont pas les travailleurs qui sont responsable des gâchis du capitalisme financiers




Michel CIALDELLA
ex-administrateur  CGT à la CPAM de Grenoble
6, rue Joseph Bertoin 38600 Fontaine
michel.cialdella@orange.fr
http://michel-lecitoyen.blogspot.com



À l'attention de Monsieur le rédacteur en chef de "l'Humanité".

Suite à l'article, d'une page du professeur Morgan Rouprêt, paru dans L'Humanité du 29 janvier 2014 et qui porte le titre « Un déni de démocratie sanitaire ». Vous voudrez bien faire un peu de place à ma réaction. Depuis plusieurs décennies je milite pour la défense et l'amélioration de la sécurité sociale, et je pense être plus compétent que lui pour parler de cette grande conquête ouvrière.

Je ne suis pas qualifié pour porter un jugement sur le contenu médical de l'article. Mais je constate que l'on peut être un grand professeur et enfourcher les chevaux de bataille de ceux qui ont toujours combattu la « Sécu ».
Par exemple, la phrase : « Attaquons-nous plutôt à la gabegie dont la Sécurité sociale est la victime permanente : arrêts de travail, transports sanitaires, doublons des examens de radiologie… ».
Non seulement ce monsieur étale sa méconnaissance de la sécurité sociale, mais également son mépris pour les salariés.
L'arrêt de travail fait partie des thérapeutiques qui parfois valent mieux que des médicaments. S’il y a quelques abus, il ne faut pas généraliser. Aujourd'hui le principal problème en matière d'arrêt travail c'est que les salariés refusent de s'arrêter par peur de perdre leur emploi et sont victime de cette propagande imbécile. Les 400 suicides à cause du travail, les milliers de victimes d'accidents de travail, les maladies professionnelles dont l'amiante et ses dizaines de milliers de victimes à cause de l'incurie du patronat et des dirigeants de ce pays ça c'est de la gabegie.
Il faudrait également définir ce qu'est un abus, à partir de quel moment doit-on être en arrêt de travail ? Doit-on attendre d'être à moitié mort ?
Monsieur le professeur, si vous voulez vous en prendre au gâchis, regardez plutôt du côté des exonérations de cotisations dites "patronales", qui en réalité sont des prélèvements sur les richesses créées par les salariés eux-mêmes qui ne servent qu'à faire monter le taux de profit. Puisque vous écrivez dans L'Humanité, lisez-le et vous apprendrez que les entreprises versent 157,9 milliards d'euros de cotisations pour financer la protection sociale, près de 298,6 milliards vont aux seuls dividendes des actionnaires et en charge des intérêts et autres commissions bancaires.... Pour moi c'est ça la gabegie !
Puisque vous évoquez également le « déni de démocratie » sachez qu'il y en a un autre au moins aussi important. Selon ses fondateurs la sécurité sociale devait être gérée par les intéressés, c'est-à-dire les assurés sociaux par l'intermédiaire de leurs représentants. Au fil des réformes les prérogatives des conseils d'administration ont été réduites pour laisser place à la bureaucratie. Les élections ont été supprimées depuis 1967 (les ordonnances de Gaule - Jeanneney) à l'exception de 1983 ou le gouvernement Mitterrand-Mauroy a réintroduit les élections avec majorité aux salariés. Les gouvernements suivants ont régulièrement reporté les élections jusqu'à ce que les ordonnances Juppé les suppriment. Ainsi une vingtaine de millions de personnes ont été privées du droit d'élire leurs représentants à la sécurité sociale. Comme scandale ça se pose un peu là.
Cette année du 70e anniversaire du programme du conseil national de la résistance à rappelons ce que disait en 1946, Pierre Laroque (*) : «Nous voulons que demain les travailleurs considèrent que les institutions de sécurité sociale sont des institutions à eux, gérées par eux et ou ils sont chez eux ».
Nous en sommes loin !


(*) « Le plan français de sécurité sociale » avril 1946

mercredi 29 janvier 2014

A propos de la courbe du chômage et de son inversion




Arrêtez de nous prendre pour des demeurés

Dans un livre publié en 1998 " Chômage nous accusons", Jacques Nikonoff « nous affirmons que les gouvernements préfèrent maintenir le chômage à un niveau élevé. Nous les accusons d'avoir capitulé ».
Il explique en substance que les mesures prises pour l'emploi relevaient de l'escroquerie intellectuelle. Le livre fait État d'une note de l'équipe de Jacques Barrot qui affirme : « dans une économie marchande telle que la nôtre, la conjonction de création d'emplois et de baisse du chômage [...] A pour conséquence une hausse du prix du travail.[...] une telle réduction du chômage se traduirait alors vite, du fait d'une hausse du prix du travail, sauf à envisager un blocage des salaires, par des pertes de compétitivité insoutenable ». C'est dire si leur motivation à combattre le chômage est grande ! 
D'ailleurs la grande ambition de notre président "normal" ça n'est pas d'éradiquer le chômage mais d'inverser la courbe ! !
La théorie économique ultralibérale justifie le maintien du chômage. Cette théorie est une insulte pour ceux dont la vie a été brisée par le chômage. Elle imbibe pourtant tous les rouages de l'administration, des entreprises, des organisations internationales, parfois même des syndicats. Cette théorie s'avance masquée. Elle produit, à jet continu, des mots-mensonges : « flexibilité », « rigidité du marché du travail », « coût du travail trop élevé », « baisse des impôts et des déficits publics », « dérégulation », etc. ces mots-mensonges ont pour objectif de présenter de vrais problèmes d'une façon simpliste et d'en faire apparaître la solution comme évidente. Depuis plus de 20 ans de matraquage, ils ont acquis le statut de dogme. Affirmés et non démontrés, ils agissent comme un tabou sur de grandes masses de personnes. Ceux qui doutent de ces trois belles évidences sont victimes d'un effet de mode qui oblige à la vénération de ces nouveaux totems et de leur grand prêtre, et d'un véritable terrorisme intellectuel s'ils manifestent le moindre esprit critique. C'est ce que certains ont baptisé la « pensée unique ».
Peu à peu, cette théorie économique s'est nimbée de religiosité. Elle se prétend universelle, intemporelle, immanente. Ces grands prêtres - gourou dérisoires de la secte de l'économisme si scientologique - interprète courbe et graphiques comme les haruspices (Chez les Romains, devin qui interprétait la volonté divine, notamment en examinant les entrailles d’animaux sacrifiés ) lisaient dans les entrailles. Qui n'a vu ces agencements ridicules organisés lors des « sommets » du G7 pour des « sommets » européens pour l'emploi ? Des foules de journalistes se pressent. Et pour quel résultat ? Les communiqués, écrit dans la langue universelle, de bois ou de coton - selon les humeurs du moment - ne disent rien. Quand on y entend « accélérons la lutte contre le chômage », il faut comprendre en réalité « accroissons  la pression sur les salaires et les indemnités des chômeurs » ; il faut comprendre « flexibilité », « dérégulation », etc. ... Qui n'a vu les grandes cérémonies sacrificielles organisées par la Banque de France depuis qu'elle est dépendante de cette nouvelle "secte" ? Le rayon du projecteur annonce l'arrivée du prédicateur. Bientôt, le gouverneur portera la toge et la mitre. Faudra-t-il, pour ces économistes-là, faire un habit ?
Le 19 mars 1996, l'Assemblée nationale décide la création d'une commission d'enquête sur les aides à l'emploi. Elle chiffre à 400 milliards de francs en 1997, le coût des aides à l'emploi. À l'hiver 1998, ce chiffre constitue la dernière mise à jour officielle effectuée : 400 milliards (61 mds €) rien que pour la partie des aides à l'emploi…
Jacques Nikonoff proposé d'activer les dépenses passives du chômage en supprimant :
fonds direct de l'État pour l'emploi : 122 milliards de francs qui auraient permis de financer 855 000 emplois. Pour amorcer la pompe…
Pour la DARES : Les dépenses en faveur de l’emploi et du marché du travail, ciblées ou générales, sont estimées à 90,8 milliards d’euros (Md€) en 2010, soit 4,7 points de PIB.
Combien d'emplois pourraient ont financé aujourd'hui sur ce même principe ? Des emplois qui généreraient des recettes en cotisations sociales, en impôts et en consommation donc en emplois.
Page 196 on peut lire : « au total, la fonction publique et les entreprises publiques, au sens large, peuvent créer 500 000 emplois grâce à la réduction du temps de travail. Aucun prétexte budgétaire ne pourra s'y opposer si on active les dépenses passives du chômage pour participer au financement. Ça ne coûte pas un franc au budget de l'État et tout le monde profite de l'amélioration des services publics.
Comme membre d'une commission départementale, en tant que représentant de la CPAM de Grenoble j'ai fait état de cette information. La réponse du préfet a été : « Le public... toujours le public… ». Ce qui pour un très haut fonctionnaire n'est pas très logique !.
Toutes ces aides dites pour l'emploi n'ont qu'un but : relever le taux de profit des entreprises.
Michel Cialdella

dimanche 26 janvier 2014

Le bétisier des non-marxistes




A propos de la crise
Le diagnostic de la crise, les économistes communistes ont une large avance sur la plupart de leurs confrères. On oublie trop souvent que c’est l’un des leurs, l’économiste et historien Paul Boccara qui, dès 1967 a, le premier, évoqué les débuts de la longue crise du capitalisme. C’est par ailleurs un dirigeant du PCF, Georges Marchais, qui en 1971 déclarait : « La France, et le monde sont entrés dans une crise structurelle globale et durable. »
Malgré cela les dirigeants qui se sont succédés ont accumulé les déclarations péremptoires sur la fin de la crise.

Le bêtisier des politiciens.
Liste non exhaustive.
En 1975, Chirac voit le bout du tunnel… Et Georges Séguy alors secrétaire général de la CGT déclare : « s'il voit le bout du tunnel c'est qu'ils marche à reculons et qu'il confond l'entrée avec la sortie ! ».
En 1976 Giscard d'Estaing voit la fin de la crise et une reprise forte et durable…
En 1983, le 31 décembre, François Mitterrand : «…à de nombreux signes on voit notre pays sortir de la crise… ».
Et le 31 décembre 1985, François Mitterrand déclare : «… Nous sommes sur le bon chemin… Pour la première fois depuis  16 ans, le chômage a cessé de croître… ».
Le vendredi 10 juin 1988 à 19 h 30 sur Antenne 2. Claude Malhuret (ministre de Chirac) il est vrai en campagne électorale : « pour la première fois nous pouvons penser que la crise est derrière nous ».
En 1989, l'INSEE : « la croissance retrouvée ».
"L'Expansion" du 6 décembre 1989 : « c'est reparti pour 20 ans ».
"Le Monde" du 5 mai 1991 : «… Une reprise probable de la croissance à l'été ».
Automne 1993, Edmond Alphandéry (ministre de Balladur) voit le bout du tunnel pour le début 1994…
Mardi 10 mai 1994 sur TF1 et Antenne 2 François Mitterrand : « En vérité la crise est venue d'ailleurs, les États-Unis… Le chômage est venu avec la crise. La crise commence à lâcher pied. Je ne dis pas qu'il s'en ira avec la fin de la crise, mais il perdra de son intensité ».
Le 24 juin 1994 dans une interview à "Libération" Edmond Alphandéry (ministre de Balladur) : « ce qui me satisfait le plus, c'est que nous enregistrons des résultats plus précoces que prévu sur le fond de l'amélioration de l'emploi »… « L'économie réelle se redresse… Elle recrée des emplois… Les choses vont mieux ».
Mitterrand, le 14 juillet 1994 : « la reprise est là, le premier ministre (Balladur) à raison de le dire ».
Nicolas Sarkozy porte-parole du gouvernement le 27 juillet 1994 : « les indices économiques prouvent que la reprise est bel et bien là ».
 Édouard Balladur, premier ministre, le 12 août 1994 dans les colonnes du « Méridional » : « le pire est passé »… « La décrue du chômage va s'amorcer »… Et le 14 août 1994 sur RMC : « l'économie va mieux, le mouvement en avant a repris… Nous sommes sur la bonne voie… »
Raymond Barre, le 9 septembre 1994 : « l'amélioration de la situation économique est sensible et durable… ».
Édouard Balladur (premier ministre) le 8 septembre 1994 estime que, « grâce aux efforts » et aux « réformes très nombreuses » effectuées depuis 18 mois « la reprise économique  a été très rapidement suivie par une reprise de l'emploi ».
Nicole Notat secrétaire générale de la CFDT : « on peut raisonnablement penser que le cycle de récession est derrière nous ». En septembre 1994 dans un entretien à "La vie".
Alain Lamassoure, ministre du budget, le 4 septembre 1996 : « toutes les informations économiques tendent à montrer que nous sommes en reprise économique ».
Jacques Chirac, président de la république dans un article de presse écrit après la dissolution de l'assemblée en mai 1997 : « le temps des sacrifices derrière nous, ce qui nous attend est un formidable développement ».
Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, le 28 octobre 1997 à l'assemblée nationale : « en France comme en Europe, la reprise est là, elle est solide et profonde ».
Dominique Strauss-Kahn récidive le 6 novembre 1997 : « la reprise est là, elle est forte et plus forte et plus rapide que prévu, notamment sur l'investissement ».
Nicolas Sarkozy a Marianne le 30 mars 2012 : « Je pense que nous sommes sortis de la crise financière, que la confiance revient et que nous sommes en phase de reprise économique. »
Le 5 février 2013 dans son discours devant le parlement européen, François Hollande a déclaré : " S'il est vrai que la crise de l'euro est désormais largement derrière nous, nous sommes loin d'en avoir tiré toutes les conséquences ".
Alors, sont-ils incapables nous a-t-il pour des cons ? Nous aurions tendance à penser « les deux mon commandant ». Mais en réalité tant que nous ne sortirons pas du capitalisme, les crises se succéderont, et probablement de plus en plus graves.
J'exagère ? Lorsqu'on en a une qui dure depuis plus de 40 ans on peut penser que je n'exagère pas !