mardi 28 août 2018



En finir avec : « Et De Gaulle créa la sécurité sociale ».
La chronologie met fin à cette fable.
Le programme de la Résistance est adopté le 15 mars 1944.
Celui-ci prévoyait un plan complet de sécurité sociale, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l'État.
Il restait à construire l'organisme. Ambroise Croizat ne part pas de rien puisque dès avril 1944, à Alger, il impulse un groupe de travail de l'assemblée consultative provisoire. (1).
C'est un rapport présenté par Georges Buisson militant de la CGT (un peu oublié), qui constituera la base des ordonnances. Il est adopté par l'assemblée consultative provisoire le 31 juillet 1945, par 194 voix pour, et une voix contre (la droite). Mais il y a 84 abstentions : le M. R.P., la C.F.T.C et quelques radicaux. Ce qui invalide la thèse du consensus.
D'ailleurs la CFTC au niveau confédéral, refusera de participer à la mise en place de la Sécurité sociale.
Les ordonnances sont publiées les 4 et  19 octobre 1945. Elles sont signées par Alexandre Parodi. De Gaulle ne les signera pas. Selon Pierre Laroque il aurait été à Moscou ce jour-là.
Le 21 octobre 1945 élection de l'assemblée constituante. Les communistes obtiennent 26,2 % des voix et 159 députés. Le PCF devient le premier parti de France.
Le 13 novembre 1945 De Gaulle est élu chef du gouvernement par l'assemblée constituante.
Le 22 novembre 1945 soit 32 jours après la publication des ordonnances, Ambroise Croizat devient ministre du travail et de la Sécurité sociale. Il sera chargé de la mise en place de ce grand organisme.
La droite ne renonce pas et ne renoncera jamais. Le 22 décembre 1945 (79 jours après la publication des ordonnances) le MRP qui soutient De Gaulle, présente une proposition de loi qui a pour objet de modifier l'ordonnance du 4 octobre. On devine dans quel sens.
Le 20 janvier 1946 soit 108 jours après la publication des ordonnances, De Gaulle démissionne du gouvernement, il ne supporte pas de siéger avec quatre ministres communistes. Ce qui le met dans l'impossibilité de mettre en place la Sécurité sociale.
En 1948 dans son discours de Compiègne, De Gaulle met l'accent sur la nécessité de réduire les dépenses sociales en ces termes : « réduire les dépenses de manière durable et effective ; cela comporte, en effet, la suppression de service entier, la mise en ordre radical des entreprises nationalisées, la réforme profonde du fonctionnement des assurances sociales ».(2).
Le 30 décembre 1958 à peine revenu au pouvoir De Gaulle instaure par décret des franchises applicables au 1er janvier 1959. Ces franchises seront retirées en juillet de la même année grâce aux luttes syndicales.
Le 12 mai 1960 un décret du gouvernement De Gaulle organise par décret la mainmise de l'État sur la sécurité sociale.
En août 1967 les ordonnances De Gaulle - Jeanneney mettront fin à 20 ans de gestion par les travailleurs (majoritairement par la CGT) de la Sécurité sociale en introduisant le paritarisme qui de fait donne la majorité au patronat.
Voilà pour l'action de De Gaulle sur la Sécurité Sociale qu'il appellera toujours : les « Assurances sociales » et sans doute pas par hasard.
Dans un entretien à la revue le droit ouvrier, octobre 1995, Pierre Laroque directeur de la Sécurité sociale au ministère d'Ambroise Croizat dira : « le général De Gaulle ne m'a jamais parlé de sécurité sociale. Je l'ai rencontré à plusieurs reprises. Il ne m'en a jamais parlé ».
Comme quoi le sujet ne l'intéressait pas vraiment.
Michel CIALDELLA




1) Ambroise Croizat ou l'invention sociale. Michel était lent. Éditions GAP-2012.
2) Yves Saint-Jours, traité de sécurité sociale : le droit de la sécurité sociale. LGDJ. 1984.
Pour en savoir plus on peut lire  « La sécurité sociale une conquête en danger ». Michel Cialdella.


dimanche 26 août 2018

Nous allons nous goinfrer !



Nous allons nous goinfrer !
« Dès le 1er septembre 2019, les cotisations salariales sur les heures supplémentaires seront supprimées pour tous les salariés, dans le privé comme dans le public », a déclaré le premier ministre. En revanche,  les APL, les allocations familiales et les retraites augmenteront moins vite que l’inflation d’ici à 2020, a annoncé Édouard Philippe dimanche au Journal du dimanche.
. Selon lui, « cela représentera en moyenne plus de 200 euros supplémentaires par an » (16,66 euros par mois) pour « une personne payée au SMIC » de quoi se goinfrer, mais nous en reparlerons.
Cela bien sûr pour "donner" ( c'est gentil) du pouvoir d'achat aux salariés. C'est une attaque de plus contre la Sécu ! Et en terme de pouvoir d'achat ce sera une perte pour les travailleurs qui, pour compenser le recul de la Sécu, verront les cotisations des complémentaires augmenter.
Ce gouvernement qui veut  faire passer les privés d’emploi et les retraités pour des «  assistés  » dépense "un pognon dingue" pour les entreprises, sans aucun contrôle (contrairement aux chômeurs) , ni aucune contrepartie en termes de développement de l’emploi… Il existe plus de 4 500 dispositifs d’aides aux entreprises, et nombre d’entre elles n’hésitent pas à licencier à tour de bras ! Les niches fiscales pour les entreprises s’élèvent à près de 200 milliards d’euros en 2013 : c’est 5 fois plus que l’impôt sur les sociétés ! Les voilà les vrais assistés ! Il faut augmenter fortement les salaires (salaires, revenus de remplacement et retraites) c'est possible dans un pays qui a vu son PIB multiplier par 8,5 en valeur depuis 1949 ! C'est dire si les travailleurs de France sont productifs.
À défaut de lire Marx, Emanuel Macron et Édouard, Philippe ferait bien de lire Josph Stiglitz qui n'est pas un bolchevik, mais américain, prix Nobel d'économie.
"Les économistes qui accordent le moins d’importance à la réduction de l’inégalité des revenus sont plutôt enclins à penser que les initiatives que pourraient prendre les États pour la réduire coûtent trop cher, ou même risquent d’être contre-productives. Ces économistes « du libre marché » ont aussi le sentiment que les marchés laissés à eux-mêmes, sans interférence de l’État, sont efficaces, et que le meilleur moyen d’aider les pauvres consiste à laisser se produire, tout simplement, la croissance économique : d’une façon ou d’une autre, ses bienfaits ruisselleront jusqu’en bas de l’échelle sociale et toucheront les pauvres. (Notons avec intérêt que ces croyances persistent bien que la recherche en économie les ait privées de tout fondement intellectuel

Joseph Stiglitz "Un autre monde contre le fanatisme du marché" (2006).Editions Fayard, page 17.

" Dépenser pour renflouer les banques sans rien obtenir en retour, c'est donner de l'argent aux riches. Les stabilisateurs automatiques - les dépenses qui augmentent automatiquement quand l'économie s'affaiblit - sont l'une des formes de stimulation les plus efficaces parce qu'ils calibrent le niveau des dépenses en fonction des besoins de l'économie : il donne davantage d'argent quand il en faut plus. Ils comprennent, par exemple, les indemnités de chômage : le volume payé s'accroît automatiquement quand le taux de chômage augmente. Si l'économie se rétablit plus vite que prévu, les dépenses d'indemnisation du chômage diminuent automatiquement ". 

Joseph Stiglitz. Prix Nobel d'économie, Le triomphe de la cupidité.. Éditions les liens qui libèrent. 2010. Page 122.