lundi 14 octobre 2019

La diplomatie est parfois le règne des faux-culs





Jeu de dupes sur la suspension des ventes d’armes

Lundi, 14 Octobre, 2019
Plusieurs pays européens, dont la France, annoncent arrêter les livraisons de matériel à Ankara. Les contrats en cours continueraient cependant d’être honorés.
La diplomatie est parfois le règne des faux-semblants. En annonçant la suspension de ses projets de vente d’armes à la Turquie, à la suite de l’intervention au Kurdistan syrien, la France ne donne que l’apparence des sanctions. Ainsi, tous les contrats en cours concernant du matériel de guerre devraient rester valables. Depuis 2009, et malgré la livraison avérée d’armes par les services secrets turcs (MIT) aux djihadistes de l’« État islamique », les entreprises françaises déclarent avoir reçu l’équivalent de 594,5 millions d’euros de prises de commandes d’Ankara, soit 0,7 % du total des commandes de cette période. En revanche, le ministère de la Défense ne précise pas le type et le volume d’armes livré.
Même jeu de dupes du côté allemand. Berlin, qui fait partie des principaux exportateurs d’armes lourdes vers la Turquie avec les États-Unis et l’Italie, a également annoncé qu’« aucun nouveau permis (de vente) » ne serait accordé à Ankara. Le chef de la diplomatie, Heiko Maas, explique que sont concernés « tous les équipements militaires qui pourraient être utilisés en Syrie par la Turquie », sans toutefois préciser le type d’armements visés, ni leur montant. En 2018, les livraisons d’armes allemandes à destination d’Ankara ont représenté près d’un tiers des exportations nationales avec 770,8 millions d’euros. Soit le premier client de matériel de guerre allemand au sein de l’Otan.
Les Pays-Bas, la Norvège et la Finlande, qui avait récemment approuvé la vente de véhicules aériens sans pilote à la Turquie, ont annoncé des mesures similaires. « la Finlande n’exporte pas de matériel militaire vers des pays en guerre ou qui violent les droits humains », a fait savoir le ministre finlandais de la Défense, Antti Kaikkonen, qui indique, lui, que les licences précédemment approuvées sont en cours d’examen. Pas de quoi démonter pour autant le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu : « Même si nos alliés soutiennent l’organisation terroriste, même si nous sommes seuls, même si un embargo est imposé, quoi qu’ils fassent, notre lutte est dirigée contre l’organisation terroriste. » Comprendre les Unités de protection du peuple (YPG) kurdes.
Ce lundi, le Conseil des affaires étrangères de l’Union européenne doit se réunir afin de coordonner une approche commune vis-à-vis de l’offensive turque. Paris demande également une assemblée de la coalition en Irak et en Syrie, formée en 2014 par vingt pays dont la Turquie, afin d’« évoquer la poursuite des efforts dans ce contexte ».
Lina Sankari

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