samedi 30 mars 2013

Lettre ouverte à une caissière qui se trompe d'adversaire



Dans un supermmarché, une caissière pense à haute voix :

- On nous dit que c'est la crise, mais si on donnait un peu moins aux pauvres il y en aurait un peu plus pour tout le monde. Voilà ce qu'en substance déclarait cette (brave ?) dame. Nous n'en sommes pas encore à "salauds de pauvres" mais nous nous en approchons.

Je fais remarquer à la personne qui se considère dans la classe moyenne, qu'elle s'égare, mais ne veut rien entendre, elle sait, elle, puisque depuis 35 ans les gens qui passent à la caisse le lui disent. Alors que je dis qu'il faut prendre aux très riches, elle maintient que c'est aux pauvres qu'il faut enlever !

J'évoque ma connaissance du dossier, rien n'y fait elle préfère les ragots, sans doute parce que ça la conforte dans ce qu'elle a envie d'entendre. C'est triste, et cela veut dire que nous avons du pain sur la planche pour expliquer. Ce que ce court texte tente de faire.

Quelques chiffres (source INSEE) pour essayer de comprendre :

Puisqu'elle évoque la moyenne. En 2012, en France, le salaire moyen pour un temps plein s'élève (si on peut dire) à 2764 € mensuels bruts, soit 2082 € nets. En 2012, le salaire moyen pour une caissière à plein temps est de 1338 € nets par mois (1386 € pour les hommes).

Le salaire médian c'est-à-dire le salaire en dessous duquel se trouve la moitié des salariés est de 1653 € nets. Le SMIC net étant de 1119,69 € nets,. il ne devrait pas y avoir énormément de caissières au-dessus du salaire médian…

En France, le seuil de la pauvreté s'établit à 964 € par mois pour une personne seule. Selon ce critère, nous avons 8,6 millions de pauvres (14,1% de la population) dont la moitié (4,3 millions) dispose de moins de 781 € et 2,1 millions de moins de 642 €.

Au 1er janvier 2013, le RSA s'établit à 483 € par mois pour une personne seule et 725 € pour un couple. Un couple avec 2 enfants perçoit 1015 €.

Comment seulement imaginer que c'est à eux qu'il faut en enlever ?

La fraude.

Si elle est souvent invoquée pour justifier les attaques contre notre protection sociale, il faut la relativiser. Selon le rapport de l'ODENORE (1) la fraude aux prestations représente 4 milliards € qu'il faut rapporter aux non-recours (2) qui représentent près de 11 milliards €. Dis autremernt si on éradiquait la fraude et que les droits soient respctés il faudrait dépenser 7 milliards € de plus…

Quant aux abus concernant la branche maladie de la Sécurité sociale ils sont du pour 20% aux assurés et pour 80% aux professions médicales et surtout au travail dissimulé appelé couramment travail au noir.

Des milliards d'euros de prestations sociales non réclamés

Chaque année, ce sont 5,3 milliards d'euros de Revenu de solidarité active (RSA), 700 millions de couverture maladie universelle complémentaire (CMU C) et 378 millions d'euros d'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS), qui, selon les estimations, ne sont pas versés à leurs ayants droit. Le non-recours aux droits sociaux est bien plus massif que son pendant, la fraude sociale, estimée à 4 milliards d'euros par an, selon le livre " L'envers de la fraude sociale ", écrit par les chercheurs de l'ODENORE, et publié début novembre. Ainsi, 33% des personnes éligibles au RSA socle (ex-RMI) ne le touchent pas, faute d'en avoir fait la demande. Le taux de non-recours atteint 68% pour le RSA activité.


Et si on parlait des très riches ?

Au fil des réformes faites au nom de l'emploi, les impôts des riches ont été réduits. De niches fiscales en exonérations ce sont des milliards qui sont gaspillés chaque année. En pourcentage des sommes perçues, les riches paient moins d'impôts que les salariés.

Le CAC 40 paie moins d'impôts que les PME.

Les entreprises cotées au CAC 40 contribuent proportionnellement moins à l'impôt sur les sociétés que les PME. Selon le conseil des prélèvements obligatoires (CPO) les grandes entreprises françaises cotées au CAC 40 paient 2,3 fois moins d'impôt sur les bénéfices que les PME.

Les entreprises de moins de 20 salariés ont ainsi un taux d'impôt sur les sociétés de 30 %.

Pour celles de plus de 500 salariés, ce taux tombe à 20 %.

Pour les sociétés du CAC 40 à 8 %. La raison en est simple : la prolifération des dispositifs d'exonération de crédit d'impôt et de transfert de bénéfices vers des filiales à l'étranger. Taxés comme les PME, les grands groupes cotés paieraient 15 milliards d'euros d'impôt sur les sociétés contre 6,5 actuellement.

Les aides de l'État, c'est-à-dire nos impôts.

Ces aides représentent quelque 200 milliards € par an !

Les paradis fiscaux ont un trésor d'environ 600 milliards €. Ces richesses produites par les salariés de France ont été détournées.

Des milliards de fonds publics ont été utilisés pour "sauver" les banques sans contrepartie. Elles peuvent continuer leur gestion catastrophique.

C'est dire si les riches sont nuisible. Les salariés devraient méditer cette citation d'un universitaire américain :

« La cupidité suffit-elle à expliquer ce qui pousse quelqu’un à vouloir encore gagner des millions quand il a déjà amassé des milliards ? Peut-être avons nous a faire à quelque chose de plus proche de la gloutonnerie, un besoin psychotique de s’empiffrer alors qu’on n’a plus faim. »

Théodore Roszak, universitaire américain « La menace américaine » le cherche midi .2004.
D'autres choix sont possibles et nécessaires.

Le SMIC à 1700 € par mois.

Interdire les licenciements dits boursiers

Relever les minima sociaux pour que ceux-ci permettent une vie digne.

Actuellement il y a 5 tranches d'imposition, il faut 14 tranches pour une fiscalité plus juste et plus équilibrée.

Une hiérarchie des salaires et des revenus n'excédant pas 5 fois le SMIC (1700 / 8500)

Dans l'immédiat, faire cotiser les revenus du capital comme les salaires.

Faire cotiser les revenus financiers des entreprises non financières, qui s'élèvent à 318 milliards € en 2011, au même taux que les cotisations dites employeurs, ce qui permettrait non seulement d'annuler le déficit, mais d'améliorer la protection sociale.

Pour cela il faut donner plus de force à la CGT. Et cela c'est de votre responsabilité

Michel CIALDELLA
ex-administrateur CGT de la CPAM de Grenoble





(1) Observatoire des non-recours aux droits et services. Laboratoire mixte CNRS - Université.

(2) Non-recours, c'est-à-dire des personnes qui, soit par ignorance, soit parce qu'elles n'osent pas, n'utilisent pas leurs droits.

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