dimanche 8 mai 2016

La vérité sur Pétain


Ceux qui pensent encore que Philippe Pétain est le vainqueur de Verdun devrait lire
« La vérité sur l'affaire Pétain ». De l'historien Henri Guillemin.
Éditions utovie/h.g. 220 pages. 19 €

Ce livre, révélé par Philippe Guillemin, fils de l'historien, avait été publié à l'origine sous un pseudonyme pour des raisons de sécurité professionnelle, a été oublié pendant 50 ans ! Au moment où on banalise certaines thèses révisionnistes, où la complaisance pour une attitude douteuse le dispute à la servilité face aux montées de l'extrême droit en France, il est essentiel de bien comprendre que celle-ci n'arrive jamais par hasard au pouvoir. Mais qu'au contraire, c'est le résultat d'un long travail de préparation des esprits, de sa, de gangrène.
L'éclairage que nous apporte ici Henri Guillemin est plus qu'important : salubre.
(Quatrième de couverture).

Quelques extraits :

La chose est demeurée à peu près inconnue du grand public ; elle n'en est pas moins hors de discussion : par deux fois, en 1916, Pétain conseilla l'abandon de la rive droite de la Meuse ; par deux fois Joffre fut obligé de lui interdire ce repli désastreux. On comprend mieux alors ces lignes trop ignorées mais catégoriques du Maréchal Joffre dans ses mémoires : « Si l'histoire me reconnaît le droit de juger des généraux qui opèrent sous mes ordres je tiens à affirmer que le vrai sauveur de Verdun fut Nivelle ».

1918 maintenant. Pétain est entièrement opposé à toute stratégie offensive.… Au début de cette année 1918, on voit le général Pétain s'employer de toute son énergie à contrecarrer les desseins offensifs de Foch ; ...

Le 26 mars 1918, Poincaré consigne dans ses carnets ce que Clémenceau vient de lui apprendre : « il (Pétain) m'a dit une chose que je voudrais confier à aucun autre qu'a vous ; c'est cette phrase : « les Allemands battront les Anglais en rase campagne, après quoi ils nous battront aussi ».…

Pétain préparait un vaste repli des armées françaises vers le sud…

Toujours selon Poincaré dans ses carnets du 26 mars 1918 : « Foch me confirme ce dernier renseignement et me communique l'ordre de retraite donnée par Pétain » Foch est intervenu en hâte pour annuler ces instructions ruineuses. Mieux même. En cette fin de mars 1918, Pétain parle autour de lui de cesser le combat ; il estime la guerre perdue, la victoire, du moins, impossible. Du journal de Poincaré encore, sous la date du 27 mars 1918 : « Pétain a déclaré à Loucheur : il faudrait entamer des pourparlers de paix. Loucheur a consulté Foch, lequel a répondu : "c'est de la folie" ».

Le 31 mai suivant, attaques de Champagne n'ayant pas donné les résultats qu'on en attendait, Pétain, de sa propre initiative, prescrit un recul ; il est prêt à laisser à l'ennemi Verdun, la Lorraine, Nancy, la ligne des Vosges ; il fait donner par Franchet d'Esperey ordre d'évacuer Reims, ordre que Foch, de nouveau, devra annuler, et auquel, du reste, le général Micheler a refusé d'obéir....

En même temps, Pétain suggère à Clémenceau que le gouvernement, selon lui, doit se préparer à quitter Paris. Le 4 juin 1918, Pétain propose d'abandonner nos positions entre Dunkerque et Amiens et d'établir le front entre Amiens et la mer, sur la Somme ; ainsi commente Chadebec de Lavalade « le 4 juin 1918, exactement 44 jours avant la date où Foch va jeter les armées alliées dans une offensive irrésistible qui, en quatre mois, les conduira à la victoire, il s'est trouvé un général en chef français pour proposer l'abandon spontané des dernières parcelles de la Belgique libre, de Dunkerque, d'Arras, de Doullens, de toute la côte française au nord de la Somme, et pour envisager l'abandon, à la première alerte, de Verdun, de Nancy, des Vosges et de toute l'Alsace ».

Le 15 juillet, les Allemands attaquent. « Pétain…, concède aussitôt la victoire à l'adversaire ». Le même jour, en effet, 15 juillet 1918, à 10 heures, malgré les instructions formelles de Foch interdisant de modifier la répartition des réserves en vue de l'opération offensive qu'il méditait, Pétain donne à Fayolle l'ordre d'arrêter la préparation de l'entreprise. Et encore une fois Foch doit réparer cette intervention déplorable....

En septembre 1918 enfin, à deux mois du triomphe, on verra Pétain s'efforcer de peser sur l'esprit de Foch pour interrompre l'offensive en cours et la suspendre au moins jusqu'au printemps.

En résumé on peut conclure… qu'à quatre reprises, en 1918, le général Pétain a failli faire perdre aux alliés la guerre-
-une première fois, au début de l'année, lorsqu'il s'opposa à toute idée d'offensive dans les mois à venir et combattit le projet d'un commandement unique
-une seconde fois, à la fin de mars, lorsqu'il se résignait très aisément, à la rupture du front franco-britannique
-une troisième fois, quand il proposait (31 mai) l'évacuation de Paris et (4 juin) l'abandon de Dunkerque, d'Arras
-une quatrième fois le 15 juillet, quand il s'efforça d'arrêter net la contre-offensive prévue est ordonnée par Foch.

Sa gloire majeure, s'il faut en croire Paul Valéry dans le discours qu'il lui adressa lors de sa réception à l'Académie française, le 22 janvier 1931, serait moins encore d'avoir « sauvé Verdun » que d'avoir rétabli l'ordre dans l'armée après les mutineries du désespoir qui marquèrent la dure année 1917. On sait qu'en effet, à cette date Pétain fit fusiller un certain nombre de soldats (français). Ils étaient coupables de penser comme lui..

Vous avez dit " vainqueur de Verdun !"

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